Remacle Le Loup, Le château de Hermal, gravure, 1735 – détail.
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Aux XVIe et XVIIe siècle



Au XVIe siècle, Lucas I Van Valckenborch nous livre l'image plaisante d'une fête à Hermalle, gros bourg avec maisons en colombages et torchis près de l'église et sur la colline :

reproduction

Fête paysanne (détail), 1574, Musée Royal des Beaux-Arts, Copenhague

Oubliées les victimes de la peste (ou d'une autre maladie qu'on appela ainsi) qui avait éclaté à Liège et Huy, à l'été 1533 !  Et qui avait fortement limité les transports de personnes et de marchandises bien importants pour le village…

Hermalle est en effet connue pour ses forgerons et son charbon de bois.  Les premiers fournissent en fer étiré la sidérurgie liégeoise comme la huttoise. En 1525, par exemple, ils en livrent par bateaux 45,4 tonnes au débarquadère de Huy !  En 1576, on charge 598 tonnes de charbon de bois à Hermalle, et 997 tonnes l'année suivante… Un charbon de bois utilisé en sidérurgie mais aussi dans l'industrie armurière, pour la fonte des canons.[Suttor] Quand on pense qu'il fallait 100 hectares de forêt par an pour alimenter un fourneau…

Le 9 mars 1545, le curé de Hermalle « est condamné par l'official pour s'être intriduit dans le monastère de Flône à la faveur de la nuit, et avoir blessé grièvement l'orfèvre Collin Zutman. »  Ce n'est pas parce qu'on est prêtre qu'on ne pêche pas...[Halkin L-E] 

L'église Saint-Martin (de Tours) à Hermalle est reconstruite partiellement et son maitre-autel est consacré en novembre 1597, sous le règne du Prince Evêque de Liège Ernest de Bavière, par le suffragant André Strengnart (ou Streignart) comme l'atteste une inscription dans le bâtiment.
Nous n'avons pas retrouvé trace d'une chapelle Saint-Nicolas, pourtant citée dans l'épitaphe de Maitre Jean le Charpentier qui en était le recteur en 1515 [Leodium] et [Renardy] ; toute information sur cet édifice sera accueillie avec gratitude.

La transmission de la seigneurie de Hermalle se fait au profit du fils ainé d'Isabelle de Rougrave-Corswarem :

Johan ou Jean de Rougrave de Salme dit de Héracourt ou Haraucourt (°1500-† 18.6.1560) qui fait relief lles 19.8.1537, 28.3 & 24.6 1538 + Marguerite de Horion =>
  • Englebert III de Rougrave de Salm,
  • Mathilde/Mechtilde qui épouse Éverard de Mérode-Houffalize,
  • Cécilia qui épouse Thierry de Groesbeek et
  • Marie de Hermalle qui épouse Nicolas de Blitterswich => Anne Catherine de Blitterswich.
Englebert III de Rougrave de Salm, († 1592), faute de payer une dette de 150 florins, voit le bien saisi au profit de Guilleaume Schoeff le 3.9.1582, mais son parent Dirick de Groesbeeck en opère le retrait lignager, un droit de rachat accordé aux parents du vendeur.
De même après la saisie par Nicolas de Blitterswyck dit Passart, seigneur de Printhagen, drossart de Bilsen pour défaut de paiement d'une rente, un autre parent d'Englebert, Zegher baron de Groisbeck, opère un nouveau retrait linager (27.7.1592).
Englebert III de Rougrave de Salm
a épousé Barbe Woot de Trixhe =>
  • Emmanuel de Rougrave
  • Jean de Rougrave
Emmanuel de Rougrave  

Mais Hermalle est passée partiellement à la soeur d'Englebert III de Rougrave:
Mexthel ou Mechtilde/Mathilde de Rougrave de Salm + Évrard de Mérode => Anne de Mérode

Anne de Mérode + Zegher de Groisbeeck, seigneur del Vaulx qui fait relief le 9.12.1592
Veuve, Anne de Mérode relève Hermalle le 26.11.1603


Suite aux problèmes financiers de la famille de Rougrave de Salm, la seigneurie de Hermalle relève donc, à la fin du XVIe siècle, de diverses personnes…

Emmanuel de Rougrave
qui renonce à ses droits sur Hermalle, le 16 avril 1605, en faveur de sa cousine
Anne de Blitterswick et de son époux Jean de Berloz  

Anne de Blitterswick + en 1594 Jean baron de Berloz, comte de Hozémont, seigneur de Willen, etc.,  => Guillaume de Berloz

Guillaume de Berloz  + Marie de Hansellere (ou Hanxeler) en 1630 [BIAL,T5,1862]

Suit la cession des biens par la famille de Berlo, le 30 novembre 1638, à « Nicolas de Renesse, des barons d'Elderen, Mansny, baron de Harlem, d'Assendelft, seigneur de Draa, Rosmer, Zeinskerken, Castricum, Dennemercken, etc., pour 153 000 florins de Brabant » selon le relevé établit dans « Les Seigneuries féodales de Liége » publié dans le Bulletin de l'Institut archéologique liégeois, T. X, Carmanne, Liège, 1870, p. 139 à 144.  

Étrangement le paragraphe qui suit immédiatement indique que le 16 mai 1639 « Guillaume de Berloz et sa famille vendent la seigneurie à noble et généreux seigneur messire Conrard comte d'Ursel, baron de Hobocque, seigneur de Hinghen pour 51 000 patacons. »
Il nous manque donc une information qui explique deux ventes successives d'un même bien par la famille de Berlo en l'espace de 167 jours...  Peut-être encore un retrait lignager ?


Conrard II d'Ursel :

Les informations sur ce gentilhomme et ses descendants nous ont été principalement fournies par Monsieur Baudouin d'Ursel, par courriels et par don d'ouvrage.
En ce qui concerne la photo du reliquaire, nous la publions avec l'autorisation de Monsieur Foisselon, directeur-adjoint du musée de la Visitation.  
Nous les en remercions très vivement.



Conrard II d'Ursel
nait en 1592 d'une famille originaire de Schmalkalden, dans la Hesse, établie à Hasselt et Maestricht au XVe siècle puis à Anvers au début du XVIe s. : les Schetz.

Son père Conrard I Schetz de Grobbendonk, plus connu sous le nom de seigneur d’Hingene puis de Baron d’Hoboken, a été Conseiller et Commis des Domaines et Finances des Gouverneurs généraux, les Archiducs Albert et Isabelle, gouverneurs des Pays-Bas espagnols, et leur premier ambassadeur en Angleterre.  Il a pris le nom van Ursel - qui va être francisé en d'Ursel - suite à son adoption en 1617 par une de ses tantes : Barbe van Ursel.  Il a épousé la fille du Président du Conseil privé des Archiducs, Françoise Grusset dit Richardot.

Lorsque Françoise accouche à Bruges, le 7 novembre 1592 à 6 h du matin, son époux est absent. Le bébé est baptisé le jour même sous le nom de Flandrinus, ses parrains étant les bourgmestres de Bruges et du Franc de Bruges et la femme de ce dernier.  À son retour, Conrard I change le nom de l'enfant pour Conrard (II).

Après des études qui l'amènent à voyager en France et en Allemagne, Conrard II  est nommé par les Archiducs, à l'âge de 20 ans, amman de la ville d'Anvers (représentant du souverain en matière civile) en remplacement de son père.  Il épouse épouse Anne-Marie de Robles, fille du capitaine général et gouverneur de Lille Jean de Robles et fréquente la cour des archiducs.

Devenu duc de Hoboken par le décès de son père, Conrard II participe comme député représentant les nobles brabançons aux États généraux de 1632 ; il y joue un rôle fort actif, faisant rapport à l’infante et intervenant dans l’évaluation des monnaies.

Le 22 janvier 1638, pourtant sujet du roi d'Espagne, Conrard est nommé comte du Saint-Empire romain germanique par l’empereur Ferdinand III ; et cette irrégularité est acceptée par Philippe IV d’Espagne.

Conrard est devenu un seigneur des plus riches alors que la fortune de bien d’autres nobles est compromise.  Le 16 mai 1639, il s’offre une nouvelle propriété par l’achat de la seigneurie de Hermalle-sous-Huy à Guillaume de Berloz avec un objectif précis : devenir bourgeois de Liège !

Ce qui est accordé au « seigneur de Hermalle » le 26 juillet suivant par une Lettre de bourgeoisie. Conrard II fait désormais partie du métier des bateliers…
Il jouit donc des franchises, privilèges et autres appartenant aux bourgeois liégeois bien qu’il habite Bruxelles dans les Pays-Bas espagnols et, surtout, cela lui donne un statut neutre qui lui permet de faire fructifier dans les Provinces-Unies les rentes héritées de son grand-père.

carte des pays-Bas espagnols

Carte réalisée d'après celle de David Descamps

Conrard II ne vit donc pas au château de Hermalle mais ses jeunes enfants y demeurent.
Il habite Bruxelles où il dispose de l’hôtel familial acquis par son père au Houtmarkt / Marché-au-Bois (à l'angle du Marché au bois et de la rue de Loxum) en 1595 – hôtel qui va échapper au bombardement d’aout 1695 par le maréchal de Villeroi et être ensuite loué à la ville de Bruxelles avant de disparaitre en 1960 dans les travaux de la jonction :

gravure représentant l'hôtel à Bruxelles


Conrard a entamé rapidement la rénovation et l’agrandissement du château de Hermalle, lui donnant sa forme encore actuelle : en moellons de grès, calcaire et briques, avec 2 tours cylindriques de trois niveaux et 2 carrées, disposé du côté sud en fer à cheval autour d'une cour d'honneur - à laquelle on accède par le porche de la ferme castrale contigüe, millésimée 1642, dont le pont-levis se pose sur un pont à trois arches qui enjambe les larges douves d'eau vive.

Photo de la façade nord

Silhouette du château, côté nord, après l'agrandissement par Conrard d'Ursel.

De gauche à droite :
1- Tour-porche d'entrée avec bretèche et feuillure du tablier du pont-levis ;
d'après le dessin de Remacle Le Loup, elle aurait été terminée par un pavillon surmonté d'une flèche.
2- espace vide de construction correspondant aux douves
3- tour circulaire du XIIe s. avec toiture en poivrière
4- façade est (qui a été remaniée au XVIII
e s.)
5- tour circulaire de base XII
e s. remaniée au XVIIe
6- striées de nombreux bandeaux continus, façade sud en décrochage (partie de droite)
et l'une des deux tours quadrangulaires coiffées d'un pavillon surmonté d'un lanternon - de l'époque du Comte d'Ursel.
[9]

Le style architectural des agrandissements et ajouts est celui de la « Renaissance mosane », qui reprend le principe de la construction médiévale en colombage, remplaçant le bois de l'ossature par la pierre et n'utilisant que la brique pour le hourdage.
L'alternance du calcaire et de la brique est systématique ; les angles des murs sont harpés et les bandeaux de pierre continus accentuent l'horizontalité comme dans la plupart des bâtiments de ce style durant les trois premiers quarts du XVIIe s.

Ces bandeaux sont de hauteur différentes, les plus étroits étant alors alignés sur les appuis et les linteaux des fenêtres à croisées - ce qui n'apparait plus, toutes les fenêtres du château de Hermalle ayant été remaniées, soit au XVIIIe siècle, soit en 1850 où ont disparu les dernières fenêtres à meneaux.

tour du château de Eijsden   Tour du château de Hermalle

Comparaison de la position des baies et des bandeaux dans les années 2000 :
À gauche, les fenêtres à croisées du château de Eijsden sont telles qu'au XVIIe s. et les bandeaux sont alignés sur les appuis et linteaux.
À droite, les fenêtres remaniées du château de Hermalle ne s'inscrivent plus entre les bandeaux.

Le comte d'Ursel a obtenu le 9 février 1641 la permission de faire conduire par buses l'eau d'une fontaine qui sourd au lieu dit la voie d’Hiergnée, un peu au-dessus de la fontaine de Saint-Martin dans les bois de Hermalle, jusqu’à son château de Hermalle. Ce conduit existe encore au début du XXIe siècle.

L’époque est toujours difficile et l'Europe ravagée par des armées diverses : la Guerre de Trente ans entre la France et les Habsbourg est à son paroxysme. À deux reprises, en 1646 puis, par l'intermédiaire du duc d'Orléans, en 1651, Conrard reçoit du roi de France Louis XIV, une lettre de sauvegarde pour ses domaines - ce qui doit lui permettre d’éviter ravages et destructions de ses propriétés.

Il termine sa carrière comme maitre d’hôtel (chef du service intérieur de la Maison) du Gouverneur général des Pays-Bas, l’archiduc d’Autriche Léopold-Guillaume de Habsbourg qui a succédé à l'infante Isabelle.

Tableau de Teniers montrant le gouverneur général

Aucun portrait de Conrard d'Ursel n'est connu.
Étant donné sa fonction, on peut supposer qu'il fait partie des courtisans
qui accompagnent Léopold-Guillaume dans sa galerie d'art. Tableau de David Teniers le Jeune.
Auteur : Gryffindor.

Conrard II d'Ursel, qui fut donc chevalier, baron et seigneur d’Hoboken, vicomte de Vives, seigneur de Oostcamp, Hermalle, Hingene, comte du Saint-Empire, décède le 15 mai 1659 à Bruxelles. 
Par testament de 1659, il laisse notamment à sa femme la jouissance de Hermalle à charge de l’entretenir « comme une bonne ménagère ».

Il a eu 7 enfants et c'est son troisième fils (mais deuxième restant en vie) qui devient propriétaire de la seigneurie de Hermalle : Pierre-Albert d’Ursel.


Conrard II comte d'Ursel et du Saint-Empire + Anne-Marie de Robles d'Anappes => 
  1. Marie Claire Eugénie Albertine d’Ursel (Bruxelles 16.08.1625-1632),
  2. François comte d'Ursel et du Saint-Empire, Milan & Zeneghem, Vicomte des Vives Saint Éloy, baron de Hoboken, seigneur de Hingene, Rumpft & Opdorp, Wessegem, Ooftcamp, de Nieuwen, de Bernhem, Moergestel & d'Escousemain, Grand veneur et Haut forestier de Flandres, Colonel et Général de Bataille au service de Charles II, roi d'Espagne (Bruxelles, 11.1626-Anvers 10.08.1696) + Honorine-Marie-Dorothée de Hornes, baronne de Milan (petite seigneurie des Flandres françaises = aujourd’hui Millam dans le Nord-Pas de Calais) =>
    1. Anne-Hyacinthe d’Ursel + François comte de Tassis, de la Tour et Valsassine 
    2. Conrard-Albert Charles baron de Hermal, 1er DUC d’Ursel (1716) et de Hoboken (1717).
      Maréchal héréditaire de Brabant, gouverneur de Namur, + Éléonore-Élisabeth de Salm (1676-1757) ; le mariage se fait par procuration en 1713 grâce à l'intermédiaire de la tante de Conrard : Chrétienne (Christine) de Bernest. C'est Conard-Albert Charles qui fait passer la famille de la noblesse de robe à celle d’épée.
    3. Philippe-Albert d'Ursel dit le comte de Milan (Bruxelles 1668-Bruxelles 1746)
    4. Marie-Françoise d’Ursel + Guillaume de Melun chevalier de la Toison d’Or
    5. Angeline d’Ursel + Wolfgang (Wolphgang) de Bournonville et de Sars
    6. Marie-Marguerite d’Ursel (entre 1627 et 1630-10.06.1665), 
  3. Marie-Marguerite d’Ursel (entre 1627 et 1630-10.06.1665),
  4. Charles-Philippe (ou Philippe-Charles), Comte du Saint-Empire, Baron de Hermalle, Colonel d’un régiment d’infanterie de hauts & bas Allemands (Bruxelles 19.02.1631-décédé sans postérité des suites de blessures reçues pendant l’assaut de Saint-Ghislain, Saint-Ghislain 20 mars 1657), à l'âge de 26 ans), 
  5. Pierre-Albert d'Ursel, Comte du Saint-Empire, Baron puis comte de Hermal (Bruxelles 7.07.1632-Hermalle 17.04.1702) + Chrestienne de Bernest (ou Christine)  => Conrard-Albert Charles
  6. Marie-Claire-Eugénie-Albertine (Bruxelles 7.10.1633-Avelgem 21.08.1701. 
  7. Jeanne-Françoise d’Ursel (Bruxelles 10.1638-Hoboken 29.08.1679), bourgeoise de Liège (métier des Naiveurs), qui vit à Hermalle de 1665 à 1670

Pierre-Albert d'Ursel
 comte de Hermalle + Chrétienne (Christine) de Bernest
Il est successivement Capitaine de cavalerie au siège de Mons, Général de bataille des armées de Charles II et Capitaine des Gardes aux Pays-Bas, gentilhomme de la chambre du Gouverneur et Vicaire général de ces pays, puis sous Philippe V, Maréchal de camp, Lieutenant de la première compagnie des Mousquetaires, Lieutenant général des armées. Un militaire connu pour sa brutalité. Lorsque Charles III est reconnu légitime souverain des Pays-Bas autrichiens, Pierre-Albert reçoit à vie une pension annuelle de 8000 florins.

Le couple possédait un précieux reliquaire contenant le crâne de Saint-Antoine de Padoue – la mâchoire se trouve dans la chapelle des reliques de la basilique Saint-Antoine à Padoue – comme en attestent les deux petits médaillons fixés au socle du reliquaire – propriété, au XXIe siècle, des Sœurs visitandines de Bruxelles.

photo du reliquaire

médaillon de gauche médaillon de droite
Armes de
Pierre-Albert d'Ursel
Armes de Pierre-Albert d'Ursel
& Chrétienne de Bernest

Le reliquaire est, au XXIe siècle, propriété des Sœurs visitandines de Bruxelles.

Tout ceci tend à accorder crédit à G.C. Janson qui affirme, dans sa plaquette intitulée Flône et son abbaye imprimée en 1947 par St-Alphonse (Louvain), que les frontons découpés des autels latéraux de l'église de Flône « portent en leur milieu les médaillons en relief des donateurs : le Comte et la Comtesse de Hermalle ».   

Chrétienne d'Ursel            Pierre-Albert d'Ursel

Photographiés
dans l'église Saint-Mathieu de l'abbaye de Flône, 2022.


Catholique donc, mais très différent de son père, Pierre-Albert, véritable « panier percé », accumule les dettes et doit vendre la seigneurie de Hermalle à

Jean-Ernest baron de Surlet le 30 décembre 1686. Mais le frère de Pierre-Albert

François comte d'Ursel, fils ainé de Conrard II, profite du droit de retrait lignager pour reprendre Hermalle le 7 février 1688 au baron de Surlet et accorde la jouissance viagère du domaine à son « pauvre » frère Pierre-Albert qui continue d’y résider jusqu’à sa mort en 1702, soit pendant 15 ans.  
Dès après le décès, son épouse Chrétienne vend les meubles et vide les lieux pour partir à Bruxelles sans payer les (nombreux) créanciers...

gravure portrait de François d'Ursel

Six ans après la récupération de Hermalle, François lègue ce domaine, par testament, à son deuxième fils :

Philippe-Albert d'Ursel dit le comte de Milan (Bruxelles 1668-Bruxelles 1746), avec une rente jusqu'à la mort de Pierre-Albert, comte de Hermalle.

Philippe-Albert ne porta jamais le titre d'Hermalle mais bien celui, tout aussi irrégulier, de comte de Milan qui appartenait à son frère ainé, Conrard-Albert Charles baron de Hermal.

Les frères d'Ursel ont suivi les traces de leur père, le comte François, et fait carrière dans l'armée du roi d’Espagne. Philippe-Albert fut Capitaine des Gardes Wallonnes aux Pays-Bas, Colonel d'un régiment d'infanterie haut allemand, Maréchal de camp puis Lieutenant général des Armées tandis que son ainé eut des postes encore plus glorieux et reçut le titre de Duc.
L'ainé, Conrard-Albert, a reconnu les qualités de gestionnaire de son jeune frère et lui a ouvert gracieusement ses demeures. Pendant des années, Philippe-Albert est resté avec ses serviteurs et chevaux à l'hôtel d'Ursel à Bruxelles ou au Château de Hingene, sans aucune contrepartie.
Les deux frères sont restés célibataires pendant des décennies. Ce n’est qu’en 1713, à l'âge de 48 ans, que Conrard-Albert épouse Eleonora de Salm ; celle-ci propose une jeune femme pleine de qualités à son beau-frère mais il la refuse.
En 1729, il tombe amoureux d'une veuve et l'épouse à l'hôtel d'Ursel dans un faste que cette mésalliance n'implique pas : le repas, accompagné par un orchestre à cordes, comportait quinze paires de perdrix, douze lièvres, deux bécasses, trente-six bouteilles de vin des Alpes, quinze bouteilles de Bourgogne et douze bouteilles de vin blanc, le tout géré par des chefs des princes de la Tour et de Rubempré et un serviteur du duc d'Arenberg. Les vitres ne résistèrent pas aux détonations de douze douzaines de fusées éclairantes…
Il va de soi qu'avec ce genre de vie, Philippe-Albert, sans descendance, n'a pas souvent séjourné à Hermalle-sous-Huy…


tableau : Philippe-Albert comte de milan

Philippe-Albert d'Ursel, dit le comte de Milan


La configuration actuelle du village a commencé à se dessiner avec des bâtiments couverts d'ardoises, dont les encadrements des baies [9-1], les chainages et les soubassements sont souvent en calcaire de Meuse, les murs extérieurs étant réalisés en briques à partir de l’argile et du limon régionaux, les murs intérieurs en colombage :

photo de la façade aux 2 tours
photo du mur
Structure extérieure de la Cense Cassal
dite aussi Ferme aux deux tours
Mur en colombage
dans la Ferme anciennement dite Dacosse

Subsistent de ces bâtiments, au XXIe siècle :
  • La maison vicariale datée de 1610.
  • La ferme Dacosse , érigée en 1630, qui sera habitée jusqu'à la fin du XXe siècle par la même famille.
  • La maison de la Héna, ensemble de bâtiments édifiés à l'extrémité du village. Ce domaine dépend de l'Abbaye de Flône, sise de l'autre côté de la Meuse, fondée vers 1092 par des chanoines de l'ordre de saint Augustin qui exploitent un riche domaine foncier au moyen de fermes cultivées par des frères convers, comme celle de Hottine. [10]
De la même façon, l'église Saint-Martin (de Tours) de Hermalle dépend de l'Abbaye depuis 1182, année où elle fut confiée à l’Abbaye de Flône par Conon de Clermont, comte de Montaigu et Duras.  Elle garde aujourd'hui encore, dans sa façade nord, la mémoire du chanoine de Flône Gérard Wailley qui fut curé à Hermalle.


Gérard de Wailley :


Cet homme nait en 1623 de Libert de Wailley et de Hellewy de Bombaye. L'ascendance agnatique de celle-ci, durant 7 générations, nous conduit à Ide de Bombaye, l'épouse de Louis Marteau de Milmort de la Neuville…  un arrière-petit-fils de Henri Ier de Hermalle !

Les seules informations que nous ayons sur Gérard de Wailley viennent de sa pierre sépulcrale en pierre calcaire à veines jaunes, sculptée en haut-relief, qui resta dans l'église Saint-Martin de Hermalle jusqu'au début du XXe siècle :

photo de la pierre



Il y est représenté agenouillé au pied de la croix, mains jointes. Portant barbe et moustache, il est vêtu d'un court manteau doublé de fourrure.  Une aumusse pend à son bras gauche. 

Deux femmes l'entourent dont on peut supposer qu'elles sont ses grands-mères.  Aux quatre angles de la pierre se trouvent en effet des écussons qui représentent au-dessus les familles de son père (à g.) et de sa mère (à dr.) et en-dessous celles de sa grand-mère paternelle Marie de Bincken (à g.) et de sa grand-mère maternelle Marguerite de Verleumont.

schéma généalogique


La profession et la date de décès de Gérard de Wailley nous sont données par une table portant l'inscription

ICY GIST VENERABLE SIRE GERARD
WALLEY CHANOINE DE FLONNE ET
CURE DE HERMAL QUI TRESPASSA
LE 25 DE FEBVRIER 1632 PRIE DIEV POVR SON AME

La pierre a été encastrée dans le mur de l’église au début du XXe siècle lors du remplacement du pavage en carreaux de grès du sol de l'église par des dalles de marbre.

Le chanoine semble avoir vécu dans la ferme qui faisait face à la façade nord de l'église et qui a été bâtie en 1610. Il s'y serait trouvé en famille avec son frère Jean et sa belle-soeur née Anne de Velroux.  Les armoiries de ce couple ornent l'attique de la porte d'entrée de la cense :

armoiries wailley-velroux




Construits en briques et calcaire autour d’un noyau du XVe ou du XVIe siècle, les bâtiments de cette ferme sont disposés autour d’une cour quadrangulaire.
La façade principale du corps de logis, côté sud, présente deux niveaux. Le rez-de-chaussée en moellons de calcaire biseautés était encore percé de trois baies autrefois à croisées et de deux portes basses en 1975 :


photo

Le Patrimoine monumental de la Belgique, Tome 16/1, Mardaga, 1992, p. 360.

La porte de gauche a ensuite été comblée et une nouvelle baie a été percée dans son axe à la même hauteur que les trois autres. Le premier étage, en briques et cantonné de chaines d’angle harpées, est percé de quatre baies jadis à croisées et à six jours.
Légèrement en retrait du corps de logis se trouve une annexe de même hauteur qui a été largement remaniée au fil du temps.
Des dépendances agricoles, dont une très vaste grange avec pilier central, clôturaient la cour.
Les toitures étaient en ardoises.

La petite-fille des constructeurs va épouser Antoine de Cassal et, peu à peu, l'appellation « Cense Wailley » va céder la place à « Cense Cassal ». Ce dernier nom va interpeller M. Jules Pety de Thozée et l'inciter à faire des recherches qui sont publiées sous le titre « Le fief de Cassal à Hermalle-sous-Huy », le 7 juillet 1910, dans La Chronique archéologique du Pays de Liège (p. 75-77). Il faut reconnaitre que son texte est parsemé d'hypothèses… Ainsi écrit-il à propos du corps de logis de la cense : « œuvre minuscule peut-être de l'architecte qui construisit la maison Curtius à Liège ». Et s'il nous donne une information quant aux héritiers successeurs propriétaires de la ferme, il ne s'attache pas à creuser la généalogie des fondateurs de l'immeuble, se contentant d'explorer timidement les ancêtres du premier Cassal propriétaire…



Au XVIIe siècle, l'enseignement est toujours le plus souvent dispensé par les prêtres.  Certains enfants en profitent plus que d'autres... comme le jeune hermallien Guillaume Renard qui va devenir professeur à l'université de Louvain.

Guillaume Renard :

Guillaume Renard nait à Hermalle en 1651 et profite de l'enseignement reçu au point de poursuivre des études de philosophie à l'université de Louvain, dans la Pédagogie du Porc - cette haute école portait ce nom car elle était située en face de la taverne « Le porc sauvage » (Wildverken en flamand), au coin de la rue Kraekhoven actuelle rue de Namur [11].  

Il sort troisième de sa promotion, à l'âge de 20 ans, et se retrouve engagé comme sous-régent de ce collège où il enseigne la philosophie pendant treize ans tout en étudiant la théologie au collège du pape Adrien VI.  
Il est reçu docteur en aout 1691 et recteur en 1693. Il est surtout connu pour avoir occupé pendant quarante ans, avec habileté, la présidence du collège de Baiius, le plus riche des nombreux collèges louvanistes après le grand collège du Saint-Esprit et le collège du Pape.

On le décrit dans les termes suivants :

« Il avait un esprit vif et prompt, la parole élégante et facile, le discours grave et sentencieux ; et les leçons qui lui valurent les applaudissements généraux dans les cours publics et privés, témoignent de son profond savoir.  Homme du meilleur conseil, dont la vie se résuma dans la prière et l'étude, défenseur convaincu et sincère des constitutions apostoliques et de l'infaillibilité des papes en matière de foi et d'usages, il sut, par sa docte persuasion, ramener à l'obéissance due plus d'un esprit chancelant. »

Avec une telle réputation, il n'est pas étonnant que ses droits de nomination lui valent d'être élu chanoine de Saint-Martin, à Liège. Il meurt à Louvain le l4 décembre 1731 ; son épitaphe est dans l'église Saint-Michel.

Sans doute sincère dans ses convictions religieuses, il n'a cependant pu se détacher d'elles ni du confort où le plongeait son institution universitaire. Il a participé activement, en effet, au procès d'un autre professeur de Louvain : Martin Étienne Van Velden (ou Van de Velde), né à La Haye en 1664 dans une famille catholique vivant dans un pays protestant.

Le grand père de Martin était docteur en médecine à Leyde ; son père, docteur en droit et avocat dans la même ville. Martin est l'ainé de 10 frères et intelligent ; on l'envoie à l'université ; à 19 ans, il sort premier de la Faculté des arts : le professorat l'attend dans la pédagogie du Faucon et il s'y engage.
Professeur primaire de philosophie d'abord, il devient professeur royal de mathématiques à la Pédagogie du Faucon, puis étudie droit civil et droit canon, et acquiert sa licence.  

Dans une université où prime toujours la doctrine d'Aristote, il a pour guide Descartes ce qui indispose ses confrères.  
En 1691 il décide d'exposer deux thèses : l'une concerne la constitution de la matière, l'autre le système héliocentrique de Nicolas Copernic, ce qui met en émoi le corps professoral et une direction de l'université qui n'est toujours pas encore en état d'accepter la révolution scientifique qu'avait proposé le savant polonais vers 1530…

Malgré un premier appui du nonce auquel Van Velden expose sa thèse, la Faculté va avoir le dessus et avec l'aide de ses éminents professeurs, dont Guillaume Renard, va réduire au silence un homme qui voulait expliquer pour la première fois, dans l'université de Louvain que, oui, la terre tourne autour du soleil…  [Stévart] 

Van Velden avait aussi permis que soit menée la première recherche par microscope à l'université de Louvain car il prêta son propre microscope à l'anatomiste Philippe Verheyen qui l'utilisa jusqu'au départ du prêteur en 1712.  Il fallut attendre 1755 pour que le microscope soit à nouveau utilisé à l'université. [12]




À Hermalle, au XVIIe siècle tout comme au Moyen Âge, les villageois, dans leur majorité, sont pauvres ; certains habitent une chaumière en colombage et torchis, cultivent un lopin de terre pour eux-mêmes et sont employés par les grandes fermes en saison. D’autres n’ont que le travail saisonnier et le petit artisanat.
La situation empire lors des guerres de Louis XIV, l'armée française réquisionnant rations et fourrages (1693).

Au XVIIIe siècle... lire la suite




Notes  flèche


[9]  Document réalisé à partir d'une plaque photographique du début du XXe s. par suppression des dépendances ajoutées aux XVIIIe et XIXe s. et qui sont actuellement visibles, en perspective, entre la tour-porche et la tour du XIIe s.  Les arbres qui ont été plantés au XIXe et XXe siècles le long des douves ne permettent plus de réaliser cette prise de vue.  flèche

[9-1]  Baie : en architecture, ouverture pratiquée dans les murs ou la charpente d'un édifice pour y mettre une porte ou une fenêtre. (Définition du CNRTLflèche

[10]  Article sur l'Abbaye de Flôneflèche

[11] Les autres grandes pédagogies (collèges) de Louvain sont, à l'époque, celles du Château, du Lis et du Faucon. retour au texte 

[12] Françoise Mirguet et Françoise Hiraux, Collection de cours manuscrits de l'Université de Louvain. Catalogue analytique, Bruylant-Academia, 2003, p. 24. retour au texte 



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